DUPLESSIS' ORPHANS

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Le mardi 29 mai 2001



Bernard Descôteaux

Rarement les victimes d'un drame auront-elles eu autant de difficultés à se faire entendre et à obtenir justice que les orphelins de Duplessis. Il y a maintenant dix ans que ceux-ci ont entrepris des démarches pour obtenir excuses et réparations, sans que l'on ait pu en arriver à un dénouement qui constitue une fin, sinon heureuse, tout au moins correcte.

La réaction positive du premier ministre Bernard Landry à l'appel lancé dimanche par les centrales syndicales de rouvrir ce dossier redonne espoir. L'on sait celui-ci davantage sensible que son prédécesseur à la situation de ces personnes qui continuent encore aujourd'hui à souffrir des sévices, des mesures abusives et d'internement illégal subis il y a 50 ans et l'on peut croire qu'il fera les efforts nécessaires pour trouver le dénouement souhaité.

Le premier ministre Landry pose comme condition à la reprise du dialogue que l'on mette de côté toute rancoeur, s'adressant en cela aux orphelins de Duplessis. Avec raison, il refuse de s'engager dans une chasse aux coupables. Ce faisant, il ne fait que reprendre la position du Protecteur du citoyen et d'une commission de l'Assemblée nationale qui avaient suggéré, en 1997, que ce dossier soit abordé sans égard à la faute puisqu'on ne peut attribuer de responsabilité à une organisation en particulier.

Pour réussir, M. Landry devra aussi obtenir que le Collège des médecins et, tout particulièrement, l'Église catholique, mettent de côté pour leur part l'amertume qu'ils entretiennent à l'endroit des orphelins de Duplessis qui, pendant longtemps, ont voulu leur faire porter toute la responsabilité de leur drame. Du rôle qu'ils ont joué comme institution, ils doivent accepter d'en parler avec les victimes.

La réconciliation recherchée ne saurait faire l'économie d'un dialogue qui permettra d'établir les faits qui, comme on le sait, ne sont pas univoques. L'histoire des orphelins de Duplessis n'est pas que noire, elle a aussi ses beaux côtés et, avant toute chose, il faut que les uns comme les autres le reconnaissent. C'est ce qui permettra de donner un sens aux compensations financières et autres mesures qui pourront venir par la suite.